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Le palais et le jardin du Luxembourg (1612-1852)

Au niveau de l’actuelle avenue de l’Observatoire, au sud du jardin du Luxembourg

Image associée

Jean-Jacques Champin, d’après Régnier

Ruines du château de Vauvert, XIXe siècle, lithographie, ville de Paris

Au XIe siècle, le roi des Francs, Robert le Pieux (972-1031), fit établir sa résidence en dehors de Paris, dans un vallon planté de vignes (le « val vert »), qui laissa son nom à la demeure : le « château de Vauvert ». Ses successeurs délaissèrent ensuite le château de Vauvert, situé « au diable », c’est-à-dire bien au-delà des limites de la ville. L’ancienne demeure royale se transforma peu à peu en une ruine inquiétante, repaire de brigands des grands chemins et de mendiants.

Les légendes les plus farfelues se développèrent au sujet de l’enclos de Vauvert, considéré comme un lieu maléfique d’où s’échappaient des cris et des hurlements inexpliqués. La mauvaise réputation des ruines de Vauvert fut peut-être à l’origine de l’expression populaire « aller au diable Vauvert », même si d’autres sites ont porté le même nom, à Gentilly ou à Notre-Dame de la Vallée verte, dans le Gard…

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Eustache Le Sueur (1616-1655)

Vue de Paris et du Louvre, avec le plan de la Chartreuse de Paris, porté par deux anges, 1645-48, huile sur bois, 191 x 285 cm, Louvre

En 1257, Saint-Louis fit don de l’ancien domaine royal aux moines chartreux, dont il admirait la règle. Ceux-ci fondèrent une abbaye et entreprirent d’exorciser les lieux. Dotée de terres et de biens immobiliers, la « Chartreuse de Paris » ne cessa de s’agrandir jusqu’au XVIIe siècle : son enclos d’une vingtaine d’hectares, au sud du jardin du Luxembourg, empêcha, au XVIIe siècle, l’extension du jardin du palais de Marie de Médicis.

Conformément à la règle de saint Bruno, les moines-chartreux vivaient en ermites dans de petites maisons disposées autour d’un grand cloître. Ils possédaient une église, dédiée à Notre-Dame et saint Jean-Baptiste, qu’ils firent agrandir et décorer de nombreux tableaux d’autels peints par les meilleurs artistes de l’École française.

Un petit cloître, situé près de l’église, était connu pour ses décors. Peint à fresque au XIVe siècle, ce petit cloître fut, au début du XVIe siècle, orné de tableaux, qu’on remplaça, en 1648, par un cycle de vingt-deux peintures sur la vie de saint Bruno, réalisé par Eustache Le Sueur.

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Le cycle de saint Bruno, au Louvre

 Érigé en « Raphaël de la France » par la postérité, Eustache Le Sueur suscita l’admiration des partisans du retour à l’idéal classique et au grand goût à la fin du XVIIIe siècle.

Considéré comme un trésor national, le cycle de saint Bruno fut l’objet de tractations menées par le comte d’Angiviller, dans le but de convaincre les moines-chartreux de céder les tableaux à Louis XVI. C’est ainsi que l’administration des Bâtiments du roi fit, en 1776, l’acquisition de la plupart des tableaux de Le Sueur pour les collections royales. Cet ensemble remarquable est aujourd’hui conservé au Louvre.           

   

Rue de Vaugirard  

étude palais luwembourg

Salomon de Brosse (1571-1626)

Etude pour le palais du Luxembourg, début du XVIIe siècle, dessin, 35 x 47,5 cm, Louvre

Depuis la mort de son époux Henri IV, Marie de Médicis songeait à quitter le Louvre, qu’elle n’appréciait guère. Elle fit, en 1612, l’acquisition de l’Hôtel du duc de Piney-Luxembourg, bâti au nord du « val vert » et de l’enclos des Chartreux, avec le jardin de huit hectares qui l’environnait. La Reine-mère fit aussitôt aménager de nouveaux jardins, dont elle confia la réalisation à Jacques Boyceau (vers 1560-1635). Boyceau dessina une série de parterres symétriques autour d’une fontaine centrale, entourés d’un double déambulatoire surélevé en forme de terrasse à l’italienne.

Pour alimenter en eau les jardins de sa nouvelle demeure, la souveraine reprit le projet d’un aqueduc, captant les eaux de source du plateau de Rungis. Au moyen d’une canalisation souterraine et d’un pont, franchissant la vallée de la Bièvre à hauteur d’Arcueil et de Cachan, cet aqueduc (dit Médicis) fournit bientôt l’eau en quantité suffisante pour faire fonctionner les fontaines.

 Marie de Médicis lança, dès 1615, le chantier de sa nouvelle demeure et sollicita Salomon de Brosse pour transformer l’hôtel du duc de Piney-Luxembourg en un vaste palais à l’italienne. L’architecte proposa finalement d’édifier un nouvel édifice à l’est de la demeure du duc de Piney-Luxembourg, qui devint alors le « Petit-Luxembourg ». L’architecte imagina un corps de bâtiment cantonné de quatre gros pavillons carrés, entre cour et jardin.

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Famille des Pérelle

Vue perspective du palais du Luxembourg (alors d’Orléans), XVIIème siècle, estampe, château de Versailles.

L’état d’origine du palais Médicis paraît dans de nombreuses estampes des XVIIe et XVIIIe siècles. Une estampe des Pérelle décrit l’entrée principale de la demeure, du côté de la rue de Vaugirard. Elle se signalait par un pavillon coiffé d’un dôme, situé au milieu d’un corps de portique couvert en terrasse. Ce pavillon donnait accès à la Cour d’honneur, bordée de deux ailes de galerie en retour, terminées par des pavillons sur rue.

Au fond de la Cour d’honneur, une terrasse à balustrade, pavée de marbre et surélevée de quelques marches, précédait l’escalier et le porche d’entrée du corps de logis, cantonné par quatre gros pavillons d’angle. L’ordonnance rustiquée des trois ordres superposés (toscan, dorique et ionique) renvoyait bien sûr au palais Pitti et à l’origine florentine de Marie de Médicis.

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Famille des Pérelle

Vue et perspective du palais du Luxembourg (alors palais d’Orléans), du côté des jardins, XVIIe siècle, estampe, château de Versailles 

Du côté du jardin, le corps de logis était fortement encadré pare deux pavillons d’angle, délimitant une vaste terrasse qui menait au pavillon d’entrée, situé au milieu de la façade.

plan Gomboust

Jacques Gomboust

Lutetia, Paris [détail du palais et du jardin du Luxembourg [indiqué "d'Orléans"], avec l’enclos des Chartreux], 1652, eau-forte, BNF, Estampes

Le premier jardin dessiné par Boyceau n’était pas très étendu vers le sud, où la perspective se heurtait à l’enclos des Chartreux. En 1635, André Le Nôtre fut lui aussi confronté à l’établissement des moines-chartreux lorsqu’il réaménagea les parterres situés dans l’axe du palais.

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Le cycle de Marie de Médicis, au Louvre

En 1625, la souveraine souhaita s’installer dans sa nouvelle demeure, malgré la poursuite des travaux. Cette même année, Pierre-Paul Rubens (1577-1640) acheva les tableaux du cycle relatant les principaux événements de sa vie. Cette prestigieuse commande, passée à l’artiste trois ans plus tôt, devait être complétée par un second cycle de peintures consacré à Henri IV, jamais achevé. Les deux cycles devaient orner le premier étage des ailes du palais du Luxembourg, dont la reine venait d’entreprendre la construction.

La Reine-mère vécut peu de temps dans son somptueux palais : à force d’intriguer, elle suscita la méfiance de son fils Louis XIII, qui souhaita son éloignement de la cour, puis finit par prononcer son bannissement, en 1631, au lendemain de la « Journée des Dupes ». Marie de Médicis légua, à sa mort, le palais du Luxembourg à Gaston d’Orléans, frère puîné du roi Louis XIII. La demeure revint ensuite à sa veuve, Marguerite de Lorraine, puis à sa fille aînée, la duchesse de Montpensier, qui le vendit à sa sœur, la duchesse de Guise.

Le palais du Luxembourg revint à Louis XIV en 1694, puis au Régent Philippe d’Orléans, après 1715. Celui-ci en laissa l’usage à sa fille aînée, Marie-Louise Elisabeth, duchesse de Berry, puis à sa fille cadette, Louise Elisabeth d’Orléans.

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Palais du Luxembourg. Façade sur le jardin, seconde moitié du XIXe siècle, lithographie en camaïeu, Paris, BNF, Estampes

 En 1750, le directeur des Bâtiments du roi, Lenormant de Tournhem, proposa d’exposer une sélection de tableaux tirés des collections royales dans la galerie orientale du palais, qui devint le premier musée d’art ouvert au public en France. Cette galerie demeura accessible jusqu’en 1780. Elle fut fermée par le comte de Provence, qui avait reçu le Luxembourg deux ans plus tôt à titre d’augmentation d’apanage. L’administration reprit finalement tous les tableaux du roi, ainsi que ceux de Rubens, pour les déposer au Louvre.

 Déclaré « propriété nationale » sous la Révolution, le palais du Luxembourg fut reconverti en prison en 1795, avant d’être affecté au Directoire. En 1799, le palais fut attribué au Sénat conservateur. L’architecte Chalgrin entreprit d’importants travaux, destinés à mettre l’édifice en conformité avec sa nouvelle destination. Il aménagea la salle des séances et la bibliothèque de l’assemblée, ainsi que la salle du Trône.

A la chute de l’Empire, les Pairs succédèrent aux sénateurs. Leur grand nombre exigea de nouvelles transformations, confiées à l’architecte Alphonse de Gisors (1796-1866). En 1835, celui-ci conçut une salle de séances plus vaste, dotée d’un grand hémicycle, qu’il appliqua en avant du palais, du côté du jardin, et créa une nouvelle façade, flanquée de deux pavillons latéraux supplémentaires. 

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L’entrée principale, rue de Vaugirard

Du côté de la rue de Vaugirard, quelques retouches furent apportées à la clôture, qui présente, à ses extrémités, deux pavillons et au milieu, un porche d’entrée de forme quadrangulaire, sous un dôme circulaire. Les terrasses reliant le porche d’entrée aux pavillons d’angle, qui reposaient autrefois sur un mur massif, s’appuient désormais sur un mur à arcades.

 Chalgrin fit en outre placer des horloges de la maison Lepaute dans les deux baies centrales du dôme. Les statues du dôme, exécutées par Guillaume Berthelot (v. 1580-1648), sculpteur attitré de Marie de Médicis, et aujourd’hui remplacées par des moulages, représentent des femmes de l’Antiquité ou de l’histoire de France, symbolisant les Vertus. 

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L’attique et le fronton de l’avant-corps central du corps de logis, côté Cour d’honneur

Au début du XIXe siècle, Chalgrin avait supprimé l’ancienne terrasse fermée par une balustrade et avait construit, à la place, trois escaliers massifs d’une dizaine de marches. En 1973, on décida toutefois de rétablir l’ancienne terrasse selon le dessein de Salomon de Brosse.

L’attique est scandé de quatre statues, peut-être des moulages d’originaux réalisés par Berthelot. Le bas-relief allégorique, sculpté François-Joseph Duret (v. 1732-1816), remplace celui aux armes de France d’autrefois.

 

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Une figure de l’attique

Les figures féminines disposées entre les fenêtres de l’attique sont vêtus de tuniques et portent des attributs. La troisième statue, à partir de la gauche, représente peut-être la Géographie : elle tient une sphère et des rouleaux de parchemin.

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La façade sur le jardin

 Pour permettre la construction d’une vaste salle des séances, De Gisors construisit une nouvelle façade sud, avancée de trente mètres sur le jardin. Il pasticha l’ancienne façade à bossages du palais Médicis, que Chalgrin avait déjà modifiée au début du XIXe siècle. Cette nouvelle façade, flanquée de deux gros pavillons d’angle de trois étages, est marquée, dans l’axe, par un étroit pavillon central en ressaut, surmonté d’un lanternon.

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Le pavillon central

Le pavillon central possède un décor sculpté très riche, qui rassemble plusieurs figures allégoriques, sculptées par James Pradier (1790-1852).

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Le fronton couronnant le pavillon central, du côté du jardin (1840-41)

 Ce sculpteur éminent imagina le Génie soutenant le Zodiaque et les figures disposées au-dessus de la corniche du second étage, de part et d’autre du fronton. Il représenta, à gauche, le Mars casqué, détournant le regard, un pied sur une cuirasse, symbole de La Guerre, que Pradier unit à l’allégorie de La Sagesse, une branche d’olivier et le casque guerrier retiré, et à celle de L’Éloquence, faisant le geste de l’orateur.

Il associa, à droite, La Prudence, réfléchissant un doigt posé au coin de la bouche, serrant, dans son autre main, le miroir entouré d’un serpent, et La Justice, tenant fermement les plateaux de la balance, à la figure d’Hercule, qui abandonne la massue et la peau de lion pour une branche d’olivier, symbole de La Paix.

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James Pradier

Le Jour et la Nuit, 1840-41, pierre, Paris, palais du Luxembourg, couronnement du pavillon central, du côté du jardin

Pradier sculpta également en haut-relief les figures du Jour, brandissant un flambeau, et de La Nuit, l’une et l’autre enroulées dans des draperies gonflées d’air et semblant flotter autour de l’horloge.

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La frise du premier étage

Une large corniche d’ordre dorique, à frise de triglyphes et métopes, sépare l’étage noble et le second étage d’attique du palais du Luxembourg. Les fenêtres de l’étage noble sont flanquées de pilastres rustiques à chapiteau dorique et surmontées d’un entablement reposant sur deux consoles. La frise présente par ailleurs le motif antiquisant du bucrane (crâne de bœuf), qui était si prisé à la Renaissance.

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Le grand bassin octogonal

L’aspect actuel du jardin est le fruit d’aménagements entrepris après la Révolution, sous l’Empire et la Restauration. A la fin du XVIIIe siècle, la démolition des bâtiments de l’ancienne Chartreuse permit le percement de plusieurs rues (Assas, Fleurus et avenue de l’Observatoire) et le dégagement de la perspective méridionale du jardin du Luxembourg, dans l’axe du palais. L’architecte Chalgrin en profita pour faire remanier le parterre central et créer le grand bassin octogonal, dont le centre est occupé par un groupe d’enfants supportant une vasque.  

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Les terrasses à balustrade

Des terrasses à balustrade enserrent le parterre central vers lequel toutes les allées convergent à couvert des frondaisons. Les balustrades sont ornées de pots fleuris et gardées par des lions à leur extrémité méridionale. D’autres parties du jardin du Luxembourg sont tracées à l’anglaise. Ce jardin à l’anglaise, les terrasses et les allées secondaires sont peuplés de statues qui constituent un véritable musée de plein air.

Lire aussi en cliquant sur le lien ci-dessous :

La Grotte du Luxembourg, désormais fontaine Médicis

Les statues du jardin du Luxembourg

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