Jardin du Luxembourg
Le palais du Luxembourg, affecté au Sénat en 1879
Le palais du Luxembourg perdit définitivement sa fonction de résidence en 1791, après la fuite du comte de Provence, futur Louis XVIII, son dernier propriétaire privé. Confisquée comme « bien national », l’ancienne demeure servit de prison pendant la Terreur, avant d’accueillir les assemblées parlementaires des régimes qui se succédèrent à partir du Consulat. Deux architectes se chargèrent des travaux nécessaires à l’adaptation du palais à ses nouvelles fonctions : Jean-François Chalgrin (1739-1811) et Alphonse de Gisors (1796-1861).
La Grande galerie ou « Galerie des questeurs »
La façade méridionale du palais du Luxembourg, construite sous la Monarchie de Juillet, pastiche le style rustique du palais Médicis. Précédée d’une terrasse en rez-de-jardin, elle possède les caractères habituels du palais classique : un corps de logis, marqué par un étroit avant-corps central et flanqué de deux gros pavillons latéraux. Elle dissimule les nouvelles salles créées lors des travaux d’agrandissement menés par Alphonse de Gisors.
L’avant-corps central s’ouvre sur un vestibule, qui forme le milieu d’une grande galerie, dite Galerie des questeurs, dont les baies en plein cintre donnent sur le jardin. Cette galerie communique avec la salle René-Coty, située dans l’axe du vestibule, et les pièces aménagées au rez-de-chaussée des pavillons latéraux.
Quatre niches, avec les figures des Quatre Saisons, décorent le vestibule axial : elles représentent, d’un côté, Le Printemps et L’Automne, par François Jouffroy (1806-1882) ; de l’autre côté, L’Eté et L’Hiver, par Jules-Antoine Droz (1804-1872).
La salle au Livre d’or
L’extrémité orientale de la Galerie des questeurs communique, par de petites pièces et d’étroits corridors, avec la salle du Livre d’or. Créée par Chalgrin entre 1795 et 1805, cette salle renfermait le registre de transcription des actes d’état civil des pairs de France, de leurs descendants ou successeurs, établis par la Charte de 1814, qui avait instauré une monarchie constitutionnelle en France.
La salle du Livre d’or comprend une pièce coiffée d’un grand plafond à voussures et une petite galerie, séparée par quatre piliers quadrangulaires. L’architecte Thomas Pierre Baraguey (1748-1820) composa son décor en 1816-1817, à partir d’éléments décoratifs provenant des anciens appartements de Marie de Médicis, au Luxembourg, et de l’appartement d’été d’Anne d’Autriche, au Louvre.
Le grand salon de la salle du Livre d’or
Les tableaux et les panneaux peints remployés furent insérés dans des boiseries sculptées et dorées. Le compartiment central du grand plafond, attribué à Jean Mosnier (1600-1656), représente Marie de Médicis rétablissant la Paix ou L’Unité de l’Etat. Il est flanqué de huit petits panneaux provenant de l’oratoire de la reine, montrant des Sibylles.
Les frises décoratives du plafond
Une frise sur fond d’ivoire encadre le compartiment central du grand plafond et les panneaux des Sibylles. Elle représente des figures drapées à l’antique, adossées à des médaillons à l’imitation de la pierre, et des génies tenant des médailles ou des guirlandes végétales. Ces figures s’appuient sur des banquettes dorées, ornées de rinceaux et de corbeilles de fleurs.
L’encadrement doré de la peinture attribuée à Mosnier, les cordons moulurés séparant les bandeaux décoratifs et divers motifs ornementaux (frise de grecques) semblent avoir été dessinés et composés lors de la restauration de 1817, comme le suggère le cartouche inscrit en chiffres romains (« MDCCCXVII »).
Les voussures du grand plafond
Dans les angles des voussures, huit petits tableaux hexagonaux complètent ce dispositif : ils mettent en scène des putti qui tiennent les armes de la reine ou divers attributs (corne d’abondance, flambeau, sceptre…). Ces panneaux, fortement restaurés, reviendraient à Philippe de Champaigne (1602-1674), alors jeune débutant, ou à Simon Vouet (1590-1649).
Les écoinçons des voussures
Sous ces huit panneaux, les écoinçons des voussures sont décorés de figures drapées à l’antique, tenant des guirlandes végétales nouées de rubans, de rinceaux et de grotesques, qui se détachent sur un fond d’or.
Panneaux rectangulaires des voussures
Des panneaux rectangulaires, représentant d’autres putti sur un ciel ennuagé, occupent le milieu des voussures du grand plafond.
Les panneaux ovales des voussures (XVIIe siècle)
Des panneaux ovales, représentant des personnages campés au premier plan d’un paysage, séparent les différents éléments décoratifs des voussures.
Certaines figures peuvent être identifiées, à l’exemple de Mercure, dieu des voyageurs et du commerce, coiffé du casque ailé et tenant le caducée. Les encadrements sculptés et dorés datent des restaurations de 1817.
Le décor des pilastres et des piliers de la salle du Livre d’or
Les pilastres et les piliers de la salle du Livre d’or proviennent du petit cabinet au bord de l’eau des appartements d’été d’Anne d’Autriche dans le palais du Louvre. Ces appartements, dont il ne reste aujourd’hui que les plafonds, occupaient le rez-de-chaussée de la Petite Galerie, à l’angle extérieur sud-ouest de la Cour Carrée. Détruit en 1799, lors de la transformation de l’appartement d’été en galerie des Antiques, le cabinet au bord de l’eau dominait la Seine.
Les grotesques et les rinceaux des pilastres et des piliers de la salle du Livre d’or témoignent que les boiseries du cabinet au bord de l’eau constituaient l’un des chefs-d’œuvre de l’art décoratif du milieu du XVIIe siècle. Elles furent conçues par Charles Errard (1606-1689), peintre et décorateur hors-pair, et probablement réalisées par l’un de ses meilleurs collaborateurs, Noël Coypel (1628-1707).
Le décor des lambris bas
Les lambris bas de la salle du Livre d’or sont décorés de panneaux de faïence, peints en tons naturels, faisant écho aux frises du plafond. Ils montrent des figures de génies, disposés sur des banquettes dorées, avec de grands vases, des guirlandes végétales et des rinceaux, sur fond d’ivoire.
Les grands panneaux muraux, tendus de toiles peintes exécutées en 1858, rappellent les décors du peintre ornemaniste Jean Berain (1640-1711), connu pour avoir composé, à la fin du XVIIe siècle, la tenture des Triomphes marins, destinée au marquis de Seignelay (1651-1690), fils aîné de Jean-Baptiste Colbert.
Le compartiment hexagonal du petit plafond de la galerie, peint par un peintre anonyme vers 1625-1630, représente L’Apothéose de Marie de Médicis. Les lambris bas de la galerie portent de grands panneaux ovales, qui montrent des figures dans un paysage, avec leurs attributs.
L’annexe de la bibliothèque du Sénat
L’aile orientale du corps de logis principal renferme, au rez-de-chaussée, l’ancienne chapelle de la Chambre des Pairs de France, que l’on aménagea en 1843 et décora au cours des deux années suivantes. Des peintures religieuses ornent encore les murs, qui soutiennent une voûte sculptée et dorée, rehaussée de peintures.
La vaste salle de l’étage s’apparente à une grande galerie, qui devait recevoir les vingt-quatre tableaux à la gloire de Henri IV, commandés à Pierre-Paul Rubens (1577-1640), dont l’exécution fut abandonnée après l’exil de la Reine-Mère. Entre 1750 et 1780, cette galerie abrita toutefois le premier musée d’art ouvert au public en France. Un second musée y fut installé de 1803 à 1815, à l’instigation de Joseph-Marie Vien (1716-1809), puis de 1818 à 1886, sous l’appellation de « musée des artistes vivants ».
La voûte de l’annexe de la bibliothèque du Sénat
Dans le cadre du second projet de musée, le Sénat fit, en 1802, l’acquisition de douze peintures représentant Les Signes du Zodiaque ou Les Mois de l’année, que le peintre flamand Jacob Jordaens (1593-1678) avait peint pour sa maison d’Anvers. L’architecte Chalgrin les fixa sur la voûte en berceau de la galerie, fit compléter le décor en passant commande d’un Lever de l’Aurore à Antoine-François Callet (1741-1823) et entourer les peintures de grisailles en trompe-l’œil.
Les peintures de Jacob Jordaens
Brillant élève et collaborateur de Rubens, Jacob Jordaens s’inspira de la mythologie gréco-romaine pour personnifier chaque mois de l’année. Les personnages, révélés par une palette de couleurs chaudes, se présentent dans de saisissants raccourcis qui accentuent l’effet plafonnant. Les peintures de Jordaens furent disposées de part et d’autre du Lever de l’Aurore de Callet, qui orne le compartiment central. Le cycle débute, au nord, par le mois de septembre, conformément au calendrier républicain.
Près de la porte sud, les trois dernières peintures représentent le mois de juin (Cancer), à travers La Chute de Phaéton ; le mois de juillet (Lion), évoqué par Le Repos d’Hercule, près d’un jeune homme, avec une gerbe de blé à la main ; et le mois d’août (Vierge), personnifié par Cérès, déesse des Moissons, avec Triptolème, inventeur de la charrue, représenté sous la forme d’un enfant.
Les grisailles en trompe-l’œil
Les peintures en grisaille donnent des bordures godronnées aux compartiments et simulent la sculpture décorative (guirlandes végétales, rubans, cartouches, médaillons à motif en façon de camée…). En 1887, on transforma la galerie du « musée des artistes vivants » en annexe de la bibliothèque du Sénat.
Le salon Victor-Hugo
L’aile orientale communique, au sud, avec les salles du pavillon carré bordant, sur un côté, la terrasse de la Cour d’honneur, puis avec le salon Victor-Hugo. Ce salon est, avec celui des Messagers d’Etat, l’un des deux salons qui flanque l’imposante salle des Conférences. Il fut initialement le salon de l’Empereur Napoléon III et doit son nom au buste à l’antique de Victor Hugo, qu’Antonin Mercié (1845-1916) sculpta en 1889 pour le Sénat. L’effigie du romancier remplaça celle de l’Empereur dans un décor entièrement conçu sous le Second Empire.
Les portes à deux vantaux sont encadrées de pilastres cannelés et surmontées de figures allégoriques en stuc, à demi-couchées sur le chambranle et disposées autour d’un médaillon. Des figures féminines drapées à l’antique, avec un médaillon au profil de Victor Hugo, dominent la grande porte donnant accès à la salle des Conférences.
La salle des Conférences
La salle des Conférences fut créée, en 1852-1854, par Alphonse de Gisors, qui décloisonna trois salles du bâtiment d’origine. L’architecte s’inspira clairement des décors de la galerie d’Apollon du Louvre, imaginés par Charles Le Brun (1619-1690) sous le règne de Louis XIV.
Faisant face à la Cour d’honneur, dont elle prend le jour par neuf fenêtres, cette salle imposante présente un décor largement rehaussé d’or, composé d’allégories à la gloire de Napoléon Ier et de l’histoire de France. Elle abritait, dans sa partie centrale, le trône impérial, appuyé contre la paroi méridionale, sous un baldaquin porté par des cariatides. Pour cette raison, on lui donna d’abord le nom de « salle du Trône ».
Les voûtes et la coupole centrale
La salle des Conférences est coiffée d’une voûte qui se développe de part et d’autre d’une coupole sur pendentifs. La structure des deux portions de la voûte, délimitées par des arcs doubleaux, est particulièrement complexe. Des compartiments à bordure sculptée et dorée délimitent les peintures à sujets historiques et les médaillons à profil antique, qui ornent le sommet de chaque portion.
La coupole
La peinture de la coupole centrale, composée par Jean Alaux (1786-1864), représente deux sujets à la gloire de l’Empire. L’Apothéose de Napoléon Ier glorifie l’action de l’illustre et défunt souverain, vêtu de son manteau impérial rouge, trônant dans les cieux. A l’opposé de sa figure, L’Avenir ouvert par le règne de Napoléon III célèbre le nouvel empereur, représenté debout, sur une estrade, près de la France et diverses allégories, dont l’une présente le plébiscite des Français.
Les cariatides
Des lunettes, flanquées de pilastres et de cariatides terminées en gaîne, pénètrent les côtés des deux portions de la voûte. Ces cariatides soutiennent un entablement, couronné d’un fronton coupé.
L’hémicycle occidental
La salle des Conférences se termine, à chacune de ses extrémités, par des hémicycles voûtés en demi cul-de-four et percés de trois grands portes couronnées de frontons coupés. La porte principale est en outre flanquée de colonnes de marbre à chapiteau composite.
Les peintures des culs-de-four
Deux peintures, réalisées par Henri Lehmann (1814-1882), décorent les demi cul-de-four : à l’extrémité occidentale, La France sous le règne des Mérovingiens et des Carolingiens renaît à la foi à l’indépendance ou L’Histoire de France des origines à Charlemagne ; à l’extrémité orientale, L’Épopée française de la première croisade à Louis XIV ou La France sous les Capétiens, les Valois et les Bourbons combat pour sa religion et son unité.
La Galerie des bustes
La Galerie des bustes, aménagée en 1856, dessert la Salle des séances et communique avec la salle des Conférences par les portes latérales du mur sud. Son plafond à compartiments est orné de médaillons peints en tons naturels par Théophile Auguste Vauchelet (1802-1873), de motifs d’arabesques en camaïeu bleu sur fond d’or, de guirlandes de fruits et de génies en stuc, de médaillons peints en grisaille.
Des bustes posés sur leur socle ponctuent les murs et des vases décoratifs occupent les niches logées dans les angles de la galerie.
La salle des Séances
Alphonse de Gisors aménagea la salle des Séances entre 1836 et 1841, pour remplacer la salle précédente, devenue trop exiguë après la Révolution de 1830. La salle des Séances imaginée par De Gisors est constituée de deux hémicycles opposés : le petit hémicycle, qui contient les tribunes en bois d’acajou du Président et de l’orateur ; et le grand hémicycle, qui accueille les sièges des sénateurs, le banc des ministres et des commissions.
Jean-Baptiste Jules Klagmann (1810-1867), Jean-Jacques Elschoëcht (1797-1856) et Henry de Triqueti (1803-1874) réalisèrent les hauts lambris à panneaux sculptés appliqués sur le pourtour des deux hémicycles. Dans le petit hémicycle, la partie supérieure du mur de scène est occupée par une colonnade qui accueille les statues de sept hommes illustres. Les huit colonnes en stuc, à l’imitation du porphyre, supportent un entablement et une voûte en demi-calotte ornée de motifs d’arabesques en camaïeu bleu sur fond d’or.
Merry-Joseph Blondel (1787-1853) composa, vers 1840, les deux peintures du petit hémicycle : à gauche, Le Couronnement de Philippe V le Long et, à droite, Louis XII aux États Généraux de Tours en 1506.
Le Grand hémicycle
L’éclairage du Grand hémicycle était initialement assuré par trois demi-lunes vitrées, situées au-dessus des tribunes publiques, qu’Alphonse de Gisors avait aménagées sur un seul niveau. On supprima les demi-lunes vitrées en 1879, pour les remplacer par une verrière zénithale.
Une colonnade délimite les tribunes originelles du rez-de-chaussée, surmontées, depuis 1879, d’un second niveau créé après les comblements des demi-lunes vitrées.
La coupole du Grand hémicycle retombe sur des pendentifs qui portent des cadres d’architecture, ornés de peintures octogonales et de médaillons au profil des rois de France traités en grisaille. Elle s’appuie sur des piliers quadrangulaires, sur lesquels sont fixées des consoles, portant les bustes de quatre maréchaux d’empire : Masséna, Lannes, Mortier et Gouvion-Saint-Cyr.
Les lunettes surplombant les tribunes du premier niveau sont ornées de médaillons peints par Vauchelet.
Charlemagne (1847) et Saint-Louis (1846)
Les statues colossales en marbre de Charlemagne et de Saint-Louis, commandées en 1840 par le ministre de l’Intérieur, occupent les niches situées de part et d’autre du Petit hémicycle. Elles furent confiées au ciseau d’Antoine Etex (1808-1888) et d’Augustin Dumont (1801-1884).
Jean-Baptiste Joseph Debay, le Père (1779-1863)
Jean-Baptiste Colbert, 1844, marbre, Paris, palais du Luxembourg, Salle des séances du Sénat, Petit hémicycle
Les sept hommes illustres du mur de scène représentent, autour de la figure centrale de Colbert, celles de personnages politiques français importants sous différents régimes : Michel de L’Hospital, Mathieu Molé, Henri François d’Aguesseau, Chrétien Guillaume de Lamoignon de Malesherbes et Anne Robert Jacques Turgot.
La Grande bibliothèque du Sénat (vers 1840)
Derrière la Salle des séances, Alphonse de Gisors aménagea la Grande bibliothèque du Sénat. Située au-dessus de la Galerie des questeurs, du côté du jardin, la Grande bibliothèque comprend deux profondes galeries, qui se développent de part et d’autre d’un vestibule central, coiffé d’une coupole sur pendentifs. Chaque galerie est coiffée d’un plafond, dont les caissons sont décorés de peintures par Antoine Riesener (1808-1878) et Camille Roqueplan (1802-1855).
La coupole de la Grande bibliothèque
Le ministre de l’Intérieur passa commande de quatre statues pour garnir les piliers sur lesquels retombent les arcs doubleaux de chaque galerie : L’Histoire et La Science, par Antoine Desbœufs (1793-1862) ; La Philosophie et La Poésie épique, par Pierre-Charles Simart (1806-1857).
On sollicita Eugène Delacroix (1798-1863) pour la décoration de la coupole et de ses quatre pendentifs, ainsi que pour l’ornement du cul-de-four surplombant la fenêtre qui donne sur le jardin. La composition de Delacroix, qui s’inspire du chant IV de L’Enfer de Dante, représente « une espèce d’Élysée, où sont réunis les grands hommes qui n’ont pas reçu la grâce du baptême ».
Quatre groupes sont campés dans un paysage qui parcourt le pourtour de la coupole, dont la partie centrale est un ciel parsemé de nuages. Le premier groupe s’organise autour de la figure d’Homère, accompagné d’Ovide, Stace et Horace. Deux autres groupes représentent les Grecs et les Romains illustres. Un dernier groupe réunit les poètes, parmi lesquels Orphée et Sapho.
Les pendentifs représentent L’Éloquence, La Poésie, La Philosophie et La Théologie. La peinture du cul-de-four montre Alexandre le Grand qui, après la bataille d’Arbèles, ordonne de placer les poèmes d’Homère dans un coffret d’or provenant des dépouilles des Perses. Le général macédonien, couronné par l’allégorie de la Victoire, est représenté « assis sur un siège et près d’un vaste trophée élevé sur le champ de bataille », en présence de captives et de satrapes « dans la posture des suppliants ».
L’Escalier d’honneur
La Grande bibliothèque communique avec les salles des pavillons latéraux et du corps de logis. On peut accéder, par son extrémité occidentale, au Bureau des questeurs, au Cabinet de départ, au salon des Messagers d’État et à une ultime pièce, qui fut, au XVIIe siècle, la chambre d’apparat de la reine Marie de Médicis, où se déroula le premier acte de la « Journée des dupes ».
Cette pièce, aménagée dans le pavillon bordant, à l’ouest, la terrasse de la Cour d’honneur, précède un escalier monumental, construit par Chalgrin entre 1800 et 1803. Cet ouvrage remarquable se fit aux dépens de la galerie qui renfermait les vingt-quatre tableaux de Rubens sur la vie de Marie de Médicis, aujourd’hui conservés au Louvre. Il comprend une seule volée de marches sur un axe rectiligne, interrompue par un palier central et bordée de murs pleins, que couronne une frise de griffons et d’enroulements de feuilles d’acanthe.
La corniche en encorbellement des murs supporte une balustrade en ferronnerie, qui permet de circuler sans danger autour du Grand Escalier. Des colonnes engagées à chapiteau ionique, cannelées sous le Second Empire, soutiennent la voûte à caissons de rosaces, construite en bois et arceaux de métal.
Le palier inférieur de l’Escalier d’honneur communique, d’un côté, avec la Cour d’honneur, et de l’autre côté, avec la cour de jonction, puis le jardin et la cour du Petit-Luxembourg, résidence du président du Sénat.
La façade sur jardin de l’Hôtel du Petit-Luxembourg
Construit au milieu du XVIe siècle, cet hôtel particulier avait été acquis par François de Piney-Luxembourg en 1570, qui le céda à la reine Marie de Médicis en 1612. Devenu « Petit-Luxembourg » après l’édification du « Grand Luxembourg », la demeure connut plusieurs locataires : le cardinal de Richelieu (1585-1642) l’occupa en 1627, puis le laissa à sa nièce, Marie de Combalet, duchesse d’Aiguillon (1604-1675).
Louis II de Bourbon-Condé (1621-1686), dit le « Grand Condé », hérita du Petit-Luxembourg en 1674 ; son fils, Henri-Jules (1643-1709), le reçut ensuite. Sa veuve, Anne de Bavière (1648-1723), y vécut jusqu’à sa mort, en 1723. Dans cette demeure, leur petit-fils, Louis de Bourbon-Condé (1709-1771), comte de Clermont-en-Argonne, réunit une société des arts composée de savants, d’artistes, d’architectes, d’astronomes et de chimistes.
L’Hôtel du Petit-Luxembourg était initialement doté d’un corps de logis et de deux ailes, élevés entre cour et jardin. Au XVIIe siècle, la duchesse d’Aiguillon fit couvrir une partie de la cour par une terrasse donnant sur la rue de Vaugirard.
Entre 1709 et 1713, Anne de Bavière passa commande de nouvelles transformations à Germain Boffrand (1667-1754). L’architecte supprima la terrasse de la duchesse d’Aiguillon, qu’il remplaça par un corps de bâtiment doté de fenêtres cintrées. Il construisit le portail d’entrée, constitué d’un avant-corps et d’un portique intérieur à colonnes doriques. Il ménagea enfin trois arcades en plein cintre pour marquer l’entée des appartements de la princesse de Condé.
A l’intérieur de l’hôtel particulier, il créa un vestibule à colonnes, ouvert sur un escalier monumental, dit « Escalier Boffrand ». Cet escalier majestueux, doté d’une rampe constituée d’entrelacs en pierre de Saint-Leu, possède un plafond cintré, percé d’une calotte ovale et décoré de génies, portant des cartouches autrefois marqués aux armes des Bourbon-Condé.
Boffrand bâtit, plus à l’ouest, un nouveau bâtiment à l’emplacement des communs du XVIIe siècle, bordant aujourd’hui la Cour de la présidence. Il renferme les bureaux du directeur de cabinet et celui du président du Sénat.
Le couronnement néo-baroque de la façade de l’église
Une façade, visible depuis la rue de Vaugirard rappelle que Marie de Médicis avait, en 1621-22, fait venir auprès d’elle la congrégation bénédictine des Filles du Calvaire, pour l’installer sur deux arpents de terre, achetés aux marguilliers de Saint-Sulpice. La souveraine avait ensuite fait élever une église, un cloître et une chapelle. Ce couvent prit alors le nom de « Compassion-de-la-Vierge ».
En 1849, l’élargissement de la rue de Vaugirard entraîna la destruction de l’église, dont la façade débordait légèrement sur la voie. Le portail de l’édifice fut démonté et remonté à la place du chevet pour former une nouvelle façade. Fortement remaniée par Alphonse de Gisors, cette façade possède un couronnement de pierre, avec le buste de Marie de Médicis et Le Sacrifice du pélican, représentant symboliquement le sacrifice du Christ.
Les quatre arcades retombant sur de larges piliers creusés de niches à sculpture, formant le mur extérieur de la chapelle, est l’unique vestige authentique de l’église. Ce mur délimitait la nef de l’église et l’un de ses bas-côtés : c’est dans cet ancien bas-côté que les collaborateurs d’Alphonse de Gisors recréèrent la chapelle entre 1845 et 1854.
La chapelle de la reine
Cette chapelle se compose d’une nef unique, surmontée d’un plafond à voussures divisé en compartiments dorés, qui s’organisent autour d’une peinture centrale. Dans un esprit néo-baroque, les décorateurs recouvrirent les ornements de dorures rutilantes (guirlandes, cartouches, moulures), placèrent quatre niches sur les petits cotés, pour les statuettes des saints évangélistes, multiplièrent les frises d’arabesques et de damas, placèrent deux panneaux peints dans les lunettes du plafond.
La grande peinture ovale du maître-autel est une copie de la Mater Dolorosa, attribuée à Philippe de Champaigne.
Le plafond à voussures et l’une des deux lunettes
Une Assomption de la Vierge, réalisée par Pierre Brisset (1810-1880) en 1854, orne le compartiment central. Les peintures en trompe-l’œil des lunettes représentent deux adorations de l’Enfant Jésus : celles des bergers et des Rois Mages.
Le Grand Salon
Dans l’hôtel particulier du Petit-Luxembourg, l’ « Escalier Boffrand » menait à l’appartement de parade d’Anne de Bavière. Constitué d’une enfilade de salons, dits aujourd’hui « salons Boffrand », cet appartement fut également occupé par la petite-fille de la princesse, Mademoiselle de Clermont (1697-1741), qui s’était installée au Petit-Luxembourg en 1735.
La salle la plus vaste de l’appartement de parade est le Grand Salon, éclairé par quatre fenêtres offrant une vue sur les parterres du jardin. Les moulures et les ornements, rechampis d’or sur fond blanc, décorent les trumeaux, la partie supérieure des murs et les voussures du plafond. De grandes arcades garnies de miroirs démultiplient en outre la superficie de cette pièce d’apparat.
Les trumeaux
Les lambris des trumeaux sont décorés d’un réseau d’arabesques enserrant, à la base de chaque panneau, d’une corbeille en osier chargée de fleurs.
Les décors de grotesques, situés entre les miroirs et les fenêtres du Grand Salon, entourent de petits panneaux historiés sur le thème des saisons, associés aux signes du Zodiaque correspondant au mois. Un panneau, sous la figure du bélier, représente un forgeron, près d’un trophée d’armes, probablement Vulcain forgeant les armes du dieu Mars.
Les voussures du plafond sont ornées d’un décor de résille, dans la tradition arabesque mêlant têtes d’oiseaux, grues et têtes satyriques.
Les peintures des dessus-de-porte
Le thème des Quatre Saisons est repris dans les peintures des dessus-de-porte, réalisées par Louis de Boullogne « le Jeune » (1654-1733) dans le premier quart du XVIIIe siècle. Ces peintures mettent en scène des enfants dans des situations explicites. Les enfants tressant des guirlandes de fleurs incarnent Le Printemps ; d’autres, occupés aux moissons, évoquent L’Eté et d’autres, occupés aux vendanges, L’Automne. Pour L’Hiver, Louis de Boullogne met en scène deux enfants se réchauffant près d’un feu.
Loué au comte de Provence, futur Louis XVIII, puis confisqué comme « bien national », l’Hôtel du Petit-Luxembourg fut attribué au Directorat. Après le Coup d’État du 18 brumaire, le Premier Consul Bonaparte s’y installa avec son épouse, Joséphine. L’État prit possession du Petit-Luxembourg en 1825, pour en faire la résidence du président de la Chambre des pairs. Après avoir été la résidence du préfet de la Seine en 1871, l’Hôtel du Petit-Luxembourg est, depuis 1879, la résidence du président de la Haute assemblée.