Rue de Sèvres
La façade principale de la chapelle Saint-Vincent-de-Paul
La Congrégation des lazaristes, fondée par Vincent de Paul en 1625, occupa la maison Saint-Lazare du faubourg Saint-Denis jusqu’en 1792, lorsque le décret de la Convention sur la dispersion des Ordres religieux les en chassa. Peu après, les bâtiments de la maison Saint-Lazare furent transformés en prison. Rétablie en 1804, sous l’Empire, puis à nouveau supprimée en 1809, la Congrégation des Lazaristes fut définitivement autorisée en 1816. L’année suivante, elle s’installa, sur la proposition de Louis XVIII, dans les bâtiments de l’ancien hôtel du duc de Lorges, jusque-là dévolus au supérieur général de la Compagnie des Filles de la Charité.
L’ancien Hôtel de Lorges, désormais dévolu aux bâtiments la Congrégation des lazaristes
Sur le terrain de cette nouvelle maison, située en bordure de la rue de Sèvres, à proximité de l’Hospice des Incurables, les Lazaristes firent bâtir une chapelle destinée à abriter la châsse d’argent renfermant les restes de leur fondateur Vincent de Paul. Le plan de l’édifice fut remis aux soins de l’architecte-voyer Philibert Vasserot (1773-1840), connu pour avoir tracé un plan de Paris. Dans le même temps, Vasserot transforma l’Hôtel de Lorges, dont il ne reste que le rez-de-chaussée et une partie du premier étage du bâtiment central.
La première pierre de la chapelle fut posée le 17 août 1826 et son inauguration, par l’archevêque de Paris, eut lieu l’année suivante. L’édifice de 1827, relativement modeste, ne possédait pas de bas-côtés ni de tribunes. En 1830, la châsse de saint Vincent y fut déposée en grande pompe, mais les fidèles ne pouvaient guère s’en approcher en raison de l’exiguïté des lieux. Réalisé par l’orfèvre Charles Odiot, ce remarquable ouvrage d’art avait été présenté à l’Exposition publique des produits de l’industrie, en 1827, où il avait obtenu une médaille d’or.
La châsse de saint Vincent
Prenant la forme d’un long carré, terminé en cintre par le haut, la châsse de saint Vincent est enrichie de rinceaux d’ornements. Deux figures d’orphelins, adressant leur regard vers l’intérieur de la châsse, comme pour invoquer leur bienfaiteur, se tiennent de part et d’autre. La châsse présente le corps de Vincent, revêtu de l’aube, du surplis et de l’étole de moire violette. Le visage du saint est en cire, comme ses mains, qui serrent une croix de bois peint et vernissé.
Le couronnement de la châsse : la figure de saint Vincent
La figure principale du groupe couronnant la châsse représente le saint en gloire, montant au ciel. Elle est accompagnée de quatre angelots portant les emblèmes de la foi (le calice), de l’espérance (le bâton avec le serpent), de la charité (la corne d’abondance) et de l’Église (la croix).
Le maître-autel
C’est sur l’impulsion du Père Jean-Baptiste Étienne, ordonné prêtre en 1825, puis élu supérieur général de la Congrégation de la Mission, que la chapelle primitive fut agrandie et embellie. Il fit édifier, du côté de l’entrée, à droite, la chapelle de la Passion, en mémoire du Scapulaire révélé à une fille de la Charité, sœur Apolline, en 1844.
En 1854, le Père Étienne fit élever un maître-autel monumental, destiné à présenter remarquablement la châsse où repose le corps de saint Vincent. Encadré par deux colonnes cannelées, le maître-autel est surmonté d’un tabernacle et d’un retable architecturé appliqué contre un gradin dont la face antérieure est ornée de rinceaux.
Les faces de l’antependium et du retable sont, sur deux niveaux, scandées d’arcades et de statuettes de saints, qui rappellent la façade d’un palais « Renaissance ». La niche centrale abrite un crucifix : elle est entourée d’anges et surmontée d’un pélican, symbole de la Passion du Christ et de l’Eucharistie. Sept figures d’anges, plus petites, marquent le sommet du retable, dont les extrémités portent des niches architecturées renfermant les reliques de François de Sales et de Jeanne de Chantal.
La porte d’accès à la plateforme d’exposition de la châsse de saint Vincent
De part et d’autre du maître-autel, deux portes de style « néo-roman », flanquées de colonnes à chapiteau composite et surmontées de voussures très décorées, précèdent un escalier permettant d’accéder à la plateforme d’exposition de la châsse et de circuler sans difficulté. A partir du premier palier, ses rampes en ferronnerie relient quatorze piédestaux portant la palme du martyre, sur lesquels se tiennent les figures des premiers témoins de l’Évangile.
Vue de la nef, tournée vers l’arc triomphal et le maître-autel
En 1855, le Père Étienne confia le principal décor de la chapelle à un frère Lazariste, François Carbonnier (1787-1873) : la peinture en grisaille de l’arc triomphal surplombant le maître-autel. Le Frère François s’était formé dans l’atelier de Jacques-Louis David, puis dans celui d’Ingres, avant d’entrer chez les Lazaristes. Il composa, sur le devant de l’arc triomphal, l’Apothéose de saint Vincent et ses principales institutions. La figure de Vincent, représentée en gloire, occupe le sommet de l’arc triomphal ; elle est accompagnée de plusieurs saints.
Le bas-côté gauche, vers la chapelle de la Sainte-Vierge
En 1859, la chapelle Saint-Vincent-de-Paul fut dotée de deux bas-côtés, chacun terminé par une chapelle du côté du chœur, et de tribunes à l’étage, pour lesquelles le Frère François réalisa huit grands tableaux. Les bas-côtés sont coiffés de voûtes sur croisée d’ogives et éclairés par des fenêtres arrondies, qui dominent de petits autels latéraux. Les tribunes sont coiffées d’un toit plat ; elles possèdent de larges demi-lunes, dont les verrières sont plus simplement décorées.
Le décor du bas-côté droit
Un riche décor ornemental rehausse les pilastres, les arcs et les voûtes des bas-côtés. Des motifs de rinceaux enchevêtrés, semés d’éléments dorés, ornent chaque compartiment délimité par les arêtes des voûtes. Des médaillons à fonds d’or et à motifs végétaux (épis de blé…) composent une frise sur les arcs formerets et les arcs doubleaux. Les pilastres présentent également des médaillons qui renferment des figures, des scènes relatives à la Passion du Christ et, à plusieurs reprises, l’emblème de Vincent de Paul, consistant en un cœur enflammé, sur lequel apparaît le Christ en croix.
La chapelle Saint-Joseph
Du côté de l’abside, les chapelles des bas-côtés, surélevées de quelques marches, occupent deux travées et forment un renfoncement en cul-de-four. Dans ce renfoncement, la partie en quart de sphère est décorée de rinceaux, appliqués sur un fond d’or, et la partie inférieure, d’une tenture peinte en trompe-l’œil. La chapelle du bas-côté gauche est consacrée à la Vierge Marie, celle du bas-côté droit, à Joseph. Une statue à leur effigie domine l’autel de chacune des deux chapelles : Joseph paraît un lis à la main droite, avec l’Enfant Jésus endormi sur son bras gauche.
Une fenêtre du bas-côté droit
En 1864, les fenêtres des bas-côtés furent habillées de vitraux, réalisés par l’atelier parisien Laurent, Gsell et Cie, fondé par les peintres verriers Émile Laurent et Jean Gaspard Jules Gsell. Chaque verrière suggère les lancettes d’une fenêtre gothique : elle porte deux médaillons ovales qui illustrent un épisode de la vie de saint Vincent, ainsi qu’un médaillon rond montrant un ange au phylactère marqué d’une inscription latine des litanies de saint Vincent, en relation avec les sujets traités.
Les vitraux s’inspirent des tableaux que la Congrégation des Lazaristes avait commandés, en 1732, pour l’église de la maison Saint-Lazare. Ces tableaux, qui avaient été interprétés par l’estampe, firent l’objet de nombreuses copies après la canonisation de Vincent, en 1737. Leurs compositions étaient bien connues des deux peintres-verriers du XIXe siècle.
Les vitraux de la chapelle Saint-Joseph
Les médaillons de la sixième fenêtre représentent, à gauche, La Mort de Louis XIII (le roi mourant, alité, tenant un crucifix) et, à droite, Le Conseil de conscience (créé par Richelieu en 1642 et officialisé par Anne d’Autriche, après la mort de Louis XIII). Cette seconde scène montre le cardinal Mazarin, Anne d’Autriche, Louis XIV et saint Vincent, que la Reine Régente avait nommé pour gérer les affaires ecclésiastiques du royaume.
La voûte à caissons de la nef principale
De plan basilical, la chapelle Saint-Vincent-de-Paul possède, dans son état définitif, une nef principale, sans transept, flanquée de bas-côtés et de tribunes. Elle est précédée d’un vestibule, délimité par deux colonnes, et couverte d’une voûte en berceau, dont le décor de caissons à rosace est caractéristique des dernières années de la Restauration. Les chiffres de Vincent (« SV ») et de Marie (« AV ») s’y détachent nettement sur un fond bleu orné de méandres.
Les grandes arcades en plein cintre bordant la nef sont flanquées de pilastres et de colonnes engagées, à chapiteau dorique. Les colonnes, polies à l’imitation du marbre, soutiennent un entablement qui sert de garde-corps aux tribunes, dont les ouvertures pénètrent la voûte. Les tribunes forment deux galeries de peinture, décorées par le Frère François. La galerie de gauche est consacrée à la vie de la Vierge ; celle de droite, à la vie du Christ. La tribune située au revers de la façade principale, surplombant le vestibule d’entrée, porte l’orgue conçu par Aristide Cavaillé-Collé et installé en 1865.
Le détail de la façade principale
Cette longue campagne d’embellissement s’acheva en 1894, après la construction de la façade principale, sur la rue de Sèvres. Cette façade s’articule autour d’une grande porte rectangulaire à double vantail. De part et d’autre de la porte, quatre pilastres à chapiteau dorique compartimentent trois travées et supportent un entablement, couronné d’un large fronton pointu surmonté d’une croix.
La frise à métopes et triglyphes de l’entablement est décorée alternativement de croix grecques et des lettres entrelacées du chiffre de saint Vincent (« SV »). Le fronton renferme une inscription latine, qui désigne le saint consacré en ces lieux, sous une couronne végétale et des palmes. Au-dessus de la porte, l’entablement supporte deux volutes, reliées par une guirlande, qui accueillent une niche ronde, où se loge le buste de Vincent de Paul.
La Cour d’honneur des bâtiments de la Mission lazariste
La façade de la chapelle Saint-Vincent-de-Paul jouxte les bâtiments de la Maison mère des lazaristes. L’une de ses façades latérales longe la Cour d’honneur de cette maison : elle correspond au bas-côté et à la tribune droits, dont on reconnaît les fenêtres et les demi-lunes vitrées.
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