Les fontaines de la place Saint-Sulpice
Place Saint-Sulpice
d’après Henri Courvoisier-Voisin (1757-1830)
Vue de la place et de l’église Saint-Sulpice à Paris, vers 1815-20, gravure, Paris, musée Carnavalet
Lorsque Jean-Nicolas Servandoni remit les plans de la façade de l’église Saint-Sulpice, ceux-ci comprenaient également l’aménagement d’une vaste place en avant de l’édifice et, implicitement, la démolition des bâtiments du séminaire voisin. Malgré la pose de la première pierre des maisons qui devaient entourer la place, en 1754, l’opposition des séminaristes eut raison du projet. Pour orner cette place, Servandoni avait par ailleurs dessiné « deux fontaines d’eau jaillissante » (Les fontaines de Paris, Paris, 1828, p. 131), que l’architecte souhaitait disposer dans l’axe des tours de l’église.
En 1757, un projet de prolongement du parvis de l’église amorça tout de même le principe d’une vaste place. Dix ans plus tard, la Ville de Paris contractait un emprunt pour procéder aux expropriations et engager les travaux nécessaires. Les dimensions de la place évoluèrent peu à peu, mais surtout à partir de 1802.
Vers 1806, Napoléon ordonna l’érection d’une quinzaine de fontaines dans Paris, de nouveau confronté à la question de l’eau potable. L’alimentation de ces nouvelles fontaines devait être assurée par le canal de l’Ourcq, tout juste mis en chantier. L’un des projets, destiné à orner la place du Châtelet et à commémorer le traité de la Paix d’Amiens, fut finalement dressé face à l’église Saint-Sulpice.
C’est ainsi, qu’en 1807, la « fontaine de la Paix » prit place sur un côté de la place. Elle fut bientôt jugée inappropriée : « ce petit monument, qui n’était nullement en rapport, ni pour le caractère d’architecture, ni pour la masse, avec l’immense portique de Saint-Sulpice, offrait encore l’inconvénient d’être situé de manière à couper, de presque tous les points de la place, le développement de cette belle façade » (Amaury Pineu Duval, Les fontaines de Paris , Paris, 1828, p. 132).
La gravure réalisée d’après Courvoisier-Voisin signale la fontaine de la Paix, décrite avec précision, sur la place Saint-Sulpice. Sa localisation est toutefois imprécise : sans doute se trouvait-elle un peu plus au sud. Cette représentation de la place requiert, il est vrai, de la prudence, puisque son auteur, soucieux de signaler les machines du télégraphe de Chappe, installées sur les tours de l’église en 1794 et 1799, décrit la façade dans un état improbable : il « complète » en effet la tour sud, alors qu’elle ne fut jamais reprise par Chalgrin et demeura à l’état d’inachèvement.
Allée du séminaire, rue Bonaparte
La fontaine de la Paix (1807)
En 1824, la fontaine de la Paix fut déplacée au marché Saint-Germain, puis installée dans l’allée du séminaire, rue Bonaparte, entre la place Saint-Sulpice et la rue de Vaugirard. En 1828, Amaury Duval (1760-1838) en propose une description. L’édicule devait son nom à une figure allégorique, finalement remplacée par quatre reliefs :
« Du milieu de deux bassins carrés d’inégale grandeur, et placés l’un au-dessus de l’autre, s’élève sur un socle, un petit dé carré, et dont chaque face est couronnée par un fronton triangulaire. Au-dessous de ces frontons règne une frise composée de guirlandes de fruits où étaient entrelacées les « N » impériales et des lyres ; et un peu plus bas sont encastrés quatre bas-reliefs de marbre blanc, représentant des sujets allégoriques sur la Paix, les Arts, le Commerce et l’Agriculture. Encore au-dessous, mais seulement du côté qui faisait face à Saint-Sulpice et à l’opposite, sont deux portions de vases renversés, d’où l’eau coule dans une petite cuvette. De là elle se divise en cinq petits filets qui tombent dans le second bassin. Puis, de ce second bassin orné de congélations, l’eau retombe dans le premier, et de là, enfin, par quatre autres portions de vases, dans de petites cuvettes placées presqu’au niveau du pallier, auquel on arrive de tous côtés par trois marches non interrompues dans leur pourtour. Cette manière de multiplier les chutes d’eau peut produire de beaux effets lorsque cet élément se trouve en abondance, mais ici les effets ne sont que ridicules.
Les quatre reliefs de cette fontaine ont été exécutés par M. [Jean-Joseph] Espercieux, et les ornements par M. Marquois. L’eau dont elle s’alimente provient de la pompe de Chaillot ». (Les fontaines de Paris, Paris, 1828, p. 132).
Place Saint-Sulpice
La fontaine des Orateurs-Sacrés
La fontaine des Orateurs-Sacrés remplace celle de la Paix, mais occupe le centre de la vaste place Saint-Sulpice, qui avait atteint sa taille adulte en 1811. Ce projet ornemental fut confié à Louis Visconti (1791-1862) : l’architecte conçut une fontaine monumentale, dans un style néo-Renaissance.
La fontaine des Orateurs-Sacrés se compose d’un édicule posé sur un soubassement constitué de trois bassins octogonaux superposés de manière à favoriser les chutes d’eau en cascade. L’édicule est coiffé d’un dôme, dont l’épi de faîtage se termine par une croix.
Jacques-Auguste Fauginet (1809-1847)
Jean-Baptiste Massillon, Paris, place Saint-Sulpice, fontaine des Orateurs-Sacrés
Chaque face est creusée d’une niche à sculpture, flanquée de pilastres corinthiens. Les figures colossales de quatre fameux prédicateurs ayant vécu sous le règne de Louis XIV, représentés assis, occupent les niches : Bossuet, par Jean-Jacques Feuchères, au nord ; Fénelon, par François Lanno, à l’ouest ; Fléchier, par Louis desprez, à l’est ; Massillon, par Jacques-Auguste Fauginet, au sud.
Quatre vasques, ornées de mascarons crachant de l’eau, occupent les côtés du second bassin, en correspondance avec les angles de l’édicule. Au-dessous, quatre lions rugissant serrent les armoiries de la Ville de Paris entre leurs pattes.
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